La République démocratique du Congo (RDC) envisage sérieusement de suspendre l’application du réseau social TikTok sur son territoire, une décision qui pourrait avoir des répercussions économiques et politiques significatives.
Le président du Conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC), Christian Bosembe, a exprimé cette intention dans un long message publié sur son compte X (anciennement Twitter) le 19 janvier 2025.
» _Alors que les États-Unis viennent de suspendre TikTok, privant ainsi plus de 170 millions d’utilisateurs de cette plateforme, la République Démocratique du Congo suit avec attention cette décision, qui illustre les graves menaces que représente ce réseau social. Cette mesure met en évidence des préoccupations légitimes liées à la sécurité nationale, à la protection des données personnelles et à la sacralité de la vie privée, des valeurs pourtant bafouées par l’absence de transparence et de contrôle rigoureux de TikTok« _ a dit le Président du CSAC.
Un impact économique considérable
En RDC, TikTok n’est pas qu’un simple réseau social ; il est aujourd’hui un moteur économique pour de nombreux jeunes Congolais. La plateforme offre une visibilité sans précédent à des créateurs de contenu, influenceurs et entrepreneurs locaux, leur permettant de générer des revenus à travers des partenariats, des publicités ou la promotion de leurs produits.
Si l’application venait à être interdite, ces milliers de jeunes perdront une source de revenus non négligeable. Dans un pays où le taux de chômage reste élevé, cette perte pourrait exacerber les inégalités sociales et économiques.
En outre, TikTok est devenu un canal privilégié pour la publicité numérique en RDC. Les entreprises locales, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME), y voient une opportunité pour atteindre un public jeune et connecté, à moindre coût par rapport aux canaux traditionnels.
Selon des experts, l’économie numérique congolaise, encore en pleine croissance, pourrait subir une contraction notable si TikTok disparaissait du paysage
Selon des estimations, le marché de la publicité numérique en RDC est en pleine expansion, avec une croissance annuelle de 15 %.
TikTok représente une part significative de ce marché de part son algorithmes qui serait meilleur que d’autres réseaux sociaux permettant de créer des contenus viraux. Sa fermeture pourrait entraîner une contraction de ce secteur, impactant l’économie numérique du pays.
Le défi pour la protection des données et la lutte contre la dépravation des mœurs
Au-delà de l’économie, la fermeture de TikTok soulève des questions politiques cruciales.
Pour certains observateurs, le réseau social est perçu comme un outil d’influence chinoise, accusé de diffuser des contenus qui, selon ses détracteurs, participent à une « dépravation des mœurs » et à une banalisation de valeurs jugées futiles.
Cette décision reflète une volonté de contrôler les influences étrangères perçues comme néfastes, tout en soulevant des questions sur la liberté d’expression et l’accès à l’information dans le pays.
Le CSAC justifie cette éventuelle interdiction par une volonté de protéger la jeunesse congolaise contre les contenus jugés inappropriés et par une quête de souveraineté numérique.
» _En tant que Président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication, je regrette profondément que TikTok devienne un vecteur de propagande nuisible dans notre pays. Non seulement cette plateforme encourage la délinquance, mais elle facilite également l’enrôlement de jeunes dans des groupes terroristes, offrant ainsi aux extrémistes un espace pour recruter des enfants et promouvoir leur idéologie de destruction. Ce que nous constatons, et condamnons fermement, s’apparente à une apologie du terrorisme.
Malgré les multiples plaintes et avertissements émis par les autorités congolaises, TikTok persiste dans son inaction. Cette négligence met en péril notre jeunesse, compromet la sécurité intérieure et fragilise la souveraineté numérique de notre pays. Si cette situation perdure, la RDC se verra contrainte d’envisager des mesures similaires à celles prises par les États-Unis, pouvant aller jusqu’à la suspension de cette application sur l’ensemble de son territoire.« _ Peut-on lire dans le meme tweet du Président du CSAC.
Un dilemme pour l’avenir numérique de la RDC
La suspension de TikTok pose un dilemme : comment équilibrer la protection des valeurs culturelles et des jeunes, tout en soutenant l’innovation numérique et les opportunités économiques ? Le gouvernement congolais pourrait envisager des solutions alternatives, telles qu’un encadrement plus strict des contenus diffusés sur TikTok ou des partenariats avec l’entreprise pour garantir un usage responsable de la plateforme.
» _Par ailleurs, j’appelle toutes les plateformes numériques à engager un dialogue sincère et constructif avec nos institutions. Il est impératif de mettre en place des mécanismes efficaces pour contrôler les contenus diffusés, protéger les données personnelles des Congolais, et garantir un usage éthique des réseaux sociaux.
La RDC est déterminée à défendre ses valeurs fondamentales : la protection de la vie privée, la sécurité nationale et l’avenir de nos enfants. Nous ne pouvons accepter que les outils numériques, conçus pour être des espaces de partage et de progrès, deviennent des armes de destruction sociale et de division. »_ a écrit Christian Bosembe, président du CSAC via son compte X
Dans tous les cas, la fermeture de TikTok en RDC aurait des conséquences multiples, touchant à la fois l’économie, la culture et la politique. Une décision aussi lourde devra donc être soigneusement évaluée, en tenant compte des aspirations des jeunes et des besoins de développement numérique du pays.
YOSH